« 500 Conidae » s’adresse à tout public, que vous soyez étranger au monde des coquillages, que vous soyez déjà collectionneur, ou scientifique.
Avant d’entamer la visite, le débutant pourra retenir qu’il existe plus de cinquante mille espèces de coquillages répartis en familles, parmi lesquelles les Conidae. Les familles sont subdivisées en genres. Il existe une centaine de genres de Conidae qui sont dominés par le plus nombreux d’entre eux, le genre Conus, « cônes » dans le langage courant. Conidae, conus et cônes sont ainsi devenus à peu près synonymes. On en recense plus de six cents espèces, qui vivent dans les mers chaudes (et quelques unes en Méditerranée) à toutes les profondeurs jusqu’aux alentours de 1000 m. Ils mesurent de 5 millimètres à 25 cm. Les cônes sont des carnivores qui ingèrent leur proie entière après l’avoir tuée à l’aide d’un dard venimeux. Les toxines de quelques cônes parmi les plus gros sont parfois mortelles pour un humain.
Les naturalistes ont donné à chaque espèce animale ou végétale un nom latin en deux mots (comme Homo sapiens). Le premier désigne le genre, le second l’espèce elle-même. C’est ainsi qu’ont été baptisées les quatre espèces de cônes objets de cette collection. Pour plus de commodité, le terme « Conus » est parfois abrégé en « C. ». Conus magus, par exemple devient ainsi C. magus. Ces quatre espèces ont été retenues en raison de leurs qualités esthétiques et aussi pour la variabilité de leurs couleurs et dessins. La majorité des «500 Conidae » provient des Philippines, car c’est dans les eaux de ce pays que la biodiversité marine est la plus riche et que les pêcheurs professionnels sont les plus actifs.
Muni de ces connaissances, le visiteur débutant est convié à se laisser entrainer, un peu au hasard, pour le plaisir des yeux et de l’imagination, dans une première incursion au sein du monde immense et enchanté des coquillages tropicaux.
Les cônes sont l’une des familles les plus prisées par les collectionneurs. La plupart en recherchent l’ensemble des espèces. Certains se contentent de celles propres à l’aire indo-pacifique ou atlantique, à un pays, voire à une seule île. Les collections privées à vocation large ou exhaustive peuvent avoir l’inconvénient de devenir envahissantes, lourdes à gérer, à tenir à jour et à présenter. Elles ont aussi tendance à se ressembler : l’originalité est faible de l’une à l’autre. Chacun possède peu ou prou les mêmes Conus darkini, cervus ou jeanmartini pour ne citer que trois espèces précieuses. Se concentrer sur quelques-unes évite ces écueils, et donne le loisir de mieux mettre en valeur, en l’occurrence, celles qui forment la présente collection. « 500 Conidae » a été conçu dans cet état d’esprit et dans un but esthétique.
Se cantonner à conus generalis, magus, striatus et thalassiarchus est naturellement arbitraire. Il était tout aussi envisageable d’opter pour conus textile, pennaceus, ammiralis, capitaneus ou furvus, par exemple. Il s’est agi là d’un parti pris personnel, peut-être renforcé par une constatation : les couleurs de conus generalis, magus, striatus et thalassiarchus sont particulièrement stables, là ou maintes espèces blanchissent avec le temps, parfois rapidement, sous l’effet de l’exposition à l’air libre, à la lumière, aux émanations chimiques parmi lesquelles les tanins de bois employés pour la fabrication des meubles. Voir blanchir de beaux coquillages est désolant.
Conus generalis, magus, striatus et thalassiarchus ont un défaut : ces noms ne font pas consensus. De multiples appellations, en effet, ont été proposées par les taxonomistes afin de les séparer en espèces, sous-espèces, formes et variétés distinctes. Pour ne pas entrer dans ces discussions et alléger la présentation, ce site n’accompagne chaque photo que d’un minimum d’informations : C. generalis, C. magus, C. striatus ou C. thalassiarchus, suivi de la taille et de l’origine géographique.
Avec « 500 Conidae », une opportunité est ainsi offerte aux collectionneurs d’aller au fond de quatre espèces considérées comme secondaires, mais dont la richesse méritait qu’elles soient privilégiées.
Pour les scientifiques, la classification de ces cônes continue de soulever bien des questions. Le « Manuel of Living Conidae », paru il y a vingt ans, recense les noms proposés par l’ensemble des auteurs afin de les désigner pertinemment : 8 pour C. generalis, 20 pour C. magus, 5 pour C. striatus, 7 pour C. thalassiarchus. Davantage se sont ajoutés depuis.
Malgré divers efforts, C magus demeure un sujet ardu pour le taxonomiste. Les tentatives de subdivision se heurtent à l’existence de spécimens atypiques ou intermédiaires. Ses nombreuses formes amènent à réfléchir sur les limites de la variabilité intra-spécifique. Conduire les recherches indispensables pour y voir clair dans C. magus exigerait une équipe nombreuse et dotée de moyens importants. La capture de centaines de spécimens vivants, sur une aire étendue, serait nécessaire, bien que certains soient rares. Il est douteux qu’une telle entreprise puisse être conduite avec succès. Les 207 C. magus de ce site en sont peut-être l’illustration.
Sans lancer de tels défis, C generalis, striatus et thalassiarchus ont de quoi susciter des interrogations similaires. « 500 Conidae » en comporte respectivement 119, 106 et 73 dont la variabilité est élevée. Or, l’extension géographique de C. thalassiarchus est faible (une partie seulement de l’archipel philippin) alors que celle de C generalis et C. striatus est vaste (l’Océan Indien et le Pacifique occidental). Certains C. generalis ont même la particularité de changer d’aspect au milieu du dernier tour de leur coquille : dessin et teintes se modifient brutalement le long d’une ligne de croissance. Les caractéristiques qu’ils montrent alors de part et d’autre suffiraient pour tenter d’identifier deux formes ou variétés séparées.
Cette collection a été rassemblée, comme beaucoup d’autres, sans garanties suffisantes quant à l’exactitude des données associées à chaque spécimen. Son intérêt scientifique est donc limité. Pour rester à l’écart des débats sur la classification des cônes, seuls sont utilisés ici les noms C. generalis, C. magus, C striatus et C. thalassiarchus. Aux fins de comparaison ou d’étude, il restera malgré tout la morphologie générale de chaque cône et ses caractéristiques visibles à l’œil nu. Les scientifiques y trouveront peut-être des éléments utiles à leurs travaux.